« Surtout pas d’émotion dans les communications, des faits, rien que des faits ! » ou « analysons ceci de manière technique et rationnelle ».

Si le sujet de l’intelligence émotionnelle fait l’objet de nombreux ouvrages et conférences, qui font doucement bouger les mentalités, dans de nombreuses entreprises, les émotions sont souvent considérées comme un frein voire un obstacle à l’efficacité. Là, il est souvent conseillé de réduire les émotions au silence pour n’entendre que la voix de la pensée rationnelle.

Pourtant, déjà en 1990, John Mayer et Peter Salovey, ont développé le concept d’intelligence émotionnelle. Il a ensuite été diffusé par Daniel Goleman qui l’a développé et appliqué au leadership dans son article « What makes a Leader » publié dans la revue HBR en 1998. C’est notamment sur la base de leurs travaux et recherches sur le sujet, qu’il ne fait aucun doute qu’à compétences intellectuelles identiques (QI), la réussite d’une personne est moins le fait de celles-ci que de son niveau d’intelligence émotionnelle (QE).

Le lien entre l'intelligence émotionnelle et le leadership a été fait depuis les années 1990

Quelques mots sur les émotions

D’une manière générale, les dimensions émotionnelles, cognitives et comportementales de l’Homme sont interconnectées constamment et de manière permanente ; un stimulus (un évènement) va générer une émotion qui va provoquer une pensée et ensuite déclencher une action. Alternativement, ce même stimulus va d’abord générer une pensée qui va provoquer une émotion et mener à l’action et enfin, une action peut provoquer une pensée ou une émotion qui va générer une émotion ou une pensée.

Si la dimension cognitive ne fait généralement pas l’objet de questions, le sujet des émotions reste encore sensible pour de nombreuses personnes.

Avant d’aller plus loin, tordons le cou à une croyance ! Il n’y a pas de bonnes ou mauvaises émotions ! Il y a des émotions, ressenties et vécues qui nous donnent toutes des informations importantes.

Chaque émotion nous informe d’abord sur une catégorie de besoins spécifiques ; à la colère correspond le besoin de structure ou de justice ; à la tristesse, le besoin de réconfort ; la peur demande de la sécurité et de la protection, la joie a besoin d’être partagée ; le dégoût génère un besoin de prendre de la distance et la surprise du temps.

Ensuite, les émotions nous informent des valeurs et croyances qui les déclenchent. Nous ne rions ni ne pleurons pas tous pour les mêmes raisons. L’humour de Coluche ou plus récemment de Laura Laune ne fait pas rire tout le monde.

C’est quoi l’intelligence émotionnelle ?

Dans leur article sur l’intelligence émotionnelle publié en 1990, Peter Salovey et John Mayer définissent celle-ci comme « une forme d’intelligence qui suppose l’habilité à contrôler ses sentiments et émotions et ceux des autres, à faire la distinction entre eux et à utiliser cette information pour orienter ses pensées et ses actions »(1)

En 1995, Daniel Goleman, quant à lui, définit l’intelligence émotionnelle comme la capacité à développer des aptitudes fondées sur 5 composantes : la conscience de soi, la maîtrise de soi, la motivation, l’empathie et la maîtrise des relations sociales.

Intelligence émotionnelle et le leadership  Qu’est-ce qu’un leader ?

Un leader développe des qualités et des compétences qui vont lui permettre d’être reconnu par un groupe de personnes comme capable de les emmener vers un objectif ambitieux, de générer la motivation et catalyser l’action.

Dans ce rôle, cette mission, les capacités cognitives sont bien sûr importantes pour définir une vision et une stratégie intelligente ainsi qu’une conduite efficace des tâches managériales de planification, de gestion et de connaissance de l’environnement. Mais la prise en compte des émotions est essentielle pour véritablement obtenir l’adhésion de son équipe, de générer l’action dynamique et de la conduire à atteindre le ou les objectifs de manière efficace et performante dans un environnement professionnel de qualité et harmonieux où chacun pourra se développer.

De plus, dans l’environnement en perpétuel changement que nous connaissons actuellement, il n’est plus tenable pour un leader de se figer dans un style. La dimension émotionnelle associée aux capacités cognitives permet au leader d’adapter avec agilité son style et ses comportements aux changements et à la diversité de ses collaborateurs et de son environnement professionnel.

Comment faire pour développer son intelligence émotionnelle, sa capacité à utiliser les émotions ?

En évaluant et développant les 4 compétences définies par Mayer, Salovey et Caruso :

  • La capacité de percevoir ses propres émotions ainsi que celles des autres ainsi que la tonalité émotionnelle d’un environnement. C’est par exemple avoir la capacité de lire le langage du corps et les expressions du visage ;
  • La capacité d’utiliser ses émotions ressenties et perçues de manière appropriée en fonction du moment et de l’environnement. Une humeur générale maussade sera peu propice à la créativité, mais tout à fait adaptée à la revue d’un budget ;
  • La capacité de comprendre les émotions, leurs causes et progression, les sentiments complexes et apprendre à modifier la progression d’une émotion ;
  • La capacité de gérer les émotions, prendre du recul et s’observer dans une situation donnée, poser et évaluer l’émotion, sa nature et son influence. Par exemple, avoir la capacité de répondre à une insulte ou une colère en prenant du recul par rapport à l’émotion suscitée.

Intelligence émotionnelle et le leadership

Ces capacités demandent elles-mêmes d’évaluer et développer des qualités de :

  • Conscience de soi, de confiance, d’observations, pour comprendre sa propre manière de fonctionner ;
  • Empathie, de capacité à ressentir l’émotion et comprendre l’émotion vécue par l’autre ;
  • Écoute active, et adaptation à la situation et au moment ;
  • Développer de la flexibilité au changement, fiabilité, intégrité, persuasion et sens de l’humour.

En bref, il s’agit d’évaluer et développer la connaissance de soi, la compréhension de l’autre pour adapter avec agilité son style de leadership. C’est la condition sine qua non pour un leadership efficace et épanoui et un développement tout aussi efficace et harmonieux des équipes.

Enfin, bonne nouvelle, toutes ces capacités et compétences se développent… à condition de le vouloir !

 

Durant plus de 16 ans, François a occupé différentes fonctions de consultant et manager pour des sociétés majeures sur la place financière luxembourgeoise. Passionné de relations humaines, il a pris la décision de donner une toute nouvelle orientation à sa carrière et de se consacrer à une activité fascinante : le développement personnel et l’accompagnement. En 2014 il a crée la société TakeOff Coaching.

François Leclercq

Auteur de l'article - Coach et Consultant Médiateur, Take off Coaching

Notes et Sources

(1)Salovey P. & Mayer J.D. (1990), Emotionnal intelligence. Imagination, cognition and Personnality, 9, 185-211.

Kotsou I., Intelligence émotionnelle et management, comprendre et utiliser la force des émotions, 2e édition, DeBoeck, 2012.

Jencquel, J., L’intelligence émotionnelle en Leadership, devenez un leader plus efficace et épanoui, bookboon ed. 2017

Goleman, D., What makes a leader ?

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