Du 13 juin 2017 au 01 septembre 2017, l’institut a mis en place l’enquête en ligne « Harcèlement moral, agissements hostiles ? Comment vous situez-vous ? »

Le nombre de répondants ne permettant pas une cartographie exhaustive sur cette thématique, nous relevons cependant un pourcentage élévé de réponses sur certaines questions.

Nous vous invitons à découvrir ci-dessous les réponses notables sur cette enquête.

Les répondants

PARTIE 1

HARCÈLEMENT MORAL EN ENTREPRISE, VICTIME OU NON ?

La finalité de cette partie consiste à comprendre la situation des répondants qui auraient pu être  » victime présupposée de harcèlement « , ou bien  » observateur  » de ce genre de situation, voire même en étant « présupposé harceleur ».

L’état émotionnel des répondants dans une situation de harcèlement :   

En tant qu’observateur d’une situation de présupposé harcèlement :

  • c’est la gêne et le mal-être qui dominent à 21%
  •  13 % se disent anxieux
Agissements hostiles notables repérées par les personnes se sentant harcelées
  • 67 % des répondants indiquent une communication floue ou contradictoire des consignes de travail
  • 65 % indiquent des humiliations en public, un déni de reconnaissance, une surcharge de travail, le colportage de rumeurs,
  • Sous les 50  % nous retrouvons les brimades répétées, les blagues désobligeantes, l’ignorance, la mise au placard, les appels en dehors des heures de travail, les sourires constants ou déplacés
  • 5 % des personnes ont mentionné la vérification des tiroirs, casiers, poubelles, ainsi que les propos sexistes.
Qu’en disent les observateurs ?
  • 50 % des répondants repèrent des brimades répétées, suivies par les humiliations en public, le colportage de rumeurs, les sujets de blagues désobligeantes, les propos sexistes.
  • 30 % ont remarqué un contrôle des communications téléphoniques, ainsi que la vérification des tiroirs, casiers, poubelles.
  • 10 % ont observé le déni de reconnaissance, les sourires constants ou déplacés et les appels réguliers en dehors des heures de travail.

50 % des répondants ont indiqué avoir discuté de cette situation avec le harceleur.

Le harceleur a-t-il conscience du mal qu’il fait ? 

Les conséquences ?
  • 22 % des répondants indiquent prendre ou avoir pris des psychotropes
  • 9 % avoir développé une dépendance à l’alcool
  • 39 % avoir déjà pensé au suicide.
PARTIE 2

L’ENTREPRISE

Le harcèlement en entreprise peut être vécu, pour la victime comme pour l’observateur, comme un élément déclencheur d’une situation de crise. Quel rôle a eu la direction des entreprises sur ce sujet ?

Comment réagit la direction face à cette situation ?

Majoritairement, les personnes estiment que la direction ne comprend pas la gravité de ce qu’il se passe, ou bien ferme les yeux, évite le sujet. Les réponses ouvertes à cette question, montrent également que :

  • 44 % des personnes pensent que le « harceleur » est soutenu par la direction
  • 37 % que la direction ne sait pas comment réagir
  • 33 % des personnes estiment que l’information sur le « harcèlement en entreprise »  au sein de leur structure est inexistante ou insuffisante
Quels sont les principaux interlocuteurs des personnes victimes ou observatrices de harcèlement ?
  1. Entourage familial
  2. Collègues
  3. Amis
  4. Médecin de famille
  5. Syndicats
  6. Direction
  7. CHSCT
  8. Responsable des ressources humaines
  9. Comité d’entreprise

10 % des répondants indiquent ne pas en parler.

Qui doit gérer la situation ?

Quel constat faire ?

hristian Bos, directeur de l'IEDRS et médiateur professionnel« Le constat est ici alarmant, les salariés en détresse, suite à un harcèlement ou une souffrance au travail ne savent pas vers qui se tourner. Cet élément accentue le mal-être de ces personnes.

L’activité d’un membre du CHSCT (0% dans l’enquête) est centrée sur la prévention et la protection de la santé physique et mentale des salariés. En cette qualité, son rôle, en cas de harcèlement moral est divers. Outre sa mission de prévention ou son droit d’alerte, il doit être présent lorsqu’un salarié est amené à saisir le Comité pour dénoncer de tels actes, notamment pour l’aider à apporter des preuves.

Le rôle du CHSCT : De manière préventive, il ne doit pas attendre de prendre en charge un salarié qui s’estime victime de harcèlement au travail pour agir. Sa mission essentielle, en sa qualité de membre du CHSCT, est de contribuer à la prévention et à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des salariés, ainsi qu’à l’amélioration des conditions de travail.

De manière curative il peut s’entretenir avec le médecin du travail pour être en capacité de réagir efficacement à toute dénonciation.

Il a également la possibilité de mener une enquête au sein de l’entreprise, afin de détecter toute situation de harcèlement qui ne serait pas dénoncée (mise en place d’un questionnaire anonyme…).

Enfin, il peut également aussi participer à l’élaboration, avec son employeur, d’une charte de référence affirmant que la violence et le harcèlement ne sont pas admis et prévoyant la procédure à suivre si un cas survient dans l’entreprise…  »

Christian BOS, directeur de l’IEDRS

 

PARTIE 3

LES CONSEQUENCES SUR LE LIEU DE TRAVAIL

Les compétences pour traiter ce genre de situation sont-elles suffisantes en entreprise ?

Pour près de 81 %  des répondants, le manque d’information et de maîtrise sur ce sujet c’est de suite fait ressentir et ont entraîné d’autres conséquences au sein même d’un service, voire de l’entreprise.

Les conséquences sur le poste de la victime  : 

C’est la perte de motivation qui domine, suivie par l’absentéisme et une perte de productivité.

Au sein du service, c’est l’ambiance de travail détériorée qui est notable.

Enfin, au sein de l’entreprise, les répondants, ont indiqué que les conséquences ont surtout été les suspicions, rumeurs, une communication interrompue, voire une atteinte à l’image même de l’entreprise.

Pour 15 % des répondants, les conflits ont également été plus nombreux au sein de leur structure.

Quel constat faire ?

Conséquences du harcèlement moral au niveau de l’entreprise :
  • Dégradation du climat de travail et de la communication au sein des équipes de travail.
  • Une augmentation du temps consacré à des activités administratives et organisationnelles liées au conflit.
  • Conséquences économiques et financières liées à la baisse de la productivité.
  • Conséquences sur la perception de la valeur « travail » dans l’entreprise.

En premier temps, les coûts cumulés d’un mauvais climat de travail sont énormes pour l’entreprise, elles se traduisent par une baisse de performance, une diminution des relations directes informelles, ce qui peut introduire de la méfiance et la perte de confiance dans les relations interpersonnelles.

En second temps, le harcèlement coûte cher en termes d’absentéisme, des coûts de santé, des coûts de rotation du personnel et une augmentation des coûts liés aux à la procédure juridique et au jugement, ce qui peut conduire à une réduction de la qualité et de la quantité de travail.

Enfin, l’entreprise peut également supporter des coûts indirects qui sont essentiellement dus à une détérioration de l’image et de la réputation de l’entreprise, ce qui peut amener certains de ses clients et fournisseurs à s’en détourner au profit d’autres, ce qui peut compromettre à son tour la survie de l’entreprise sur le marché.
De fait, les coûts directs et indirects d’un mauvais climat de travail peuvent être énormes, non seulement pour l’entreprise, mais également pour toute la société.

Conséquences sur le salarié harcelé

Le harcèlement moral inflige à la personne qui le subit une souffrance psychologique sur le plan professionnel et personnel.
En effet, les conséquences du harcèlement sont triple.

  1. La première est une détérioration de la santé physique et mentale de la victime. L’état dépressif est l’un des troubles les plus fréquents chez les victimes du harcèlement. Il se manifeste de manière permanente par une humeur triste, un accroissement de l’angoisse, du stress, un manque d’intérêt pour le quotidien professionnel, un sentiment de dévalorisation de soi et de culpabilité par rapport à l’événement qui s’est produit.
    Ainsi, la conséquence du harcèlement moral est avant tout une pathologie de la solitude, de l’isolement, qui renforce la souffrance.
  2. La seconde conséquence se caractérise par les implications économiques non négligeables du harcèlement moral pour le salarié. Une perte de revenus pour les personnes qui se retrouvent au chômage, des frais médicaux non remboursés, les dépenses d’avocat. Ainsi, selon une étude de Hirigoyen3 en 2001, en plus des 36% de cas de harcèlement suivi par le départ de la victime, 30 % des personnes se retrouvent en arrêt de travail pour longue maladie, au chômage pour inaptitude médicale. Ainsi, dans 66 % des cas de harcèlement moral au travail, la personne est exclue du monde du travail pour un certain temps.
  3. La troisième conséquence résulte souvent des perturbations dans la communication ou les processus de production, qui entraînent non seulement une baisse de la qualité du travail, mais aussi une baisse de la productivité.

CONCLUSION

Quel rôle peut avoir la médiation dans des situations de présupposé harcèlement ?

La plupart du temps, les questions de harcèlement sont des affaires complexes.

Comment distinguer ce qui relève du harcèlement de ce qui n’en est pas ? A partir de quel moment une relation de travail naturellement traversée par des tensions, des conflits, des malentendus peut-elle être taxée de harcèlement ?

La question du seuil d’acceptabilité de la contrainte (qui alimente le phénomène de judiciarisation dans tous les domaines) se pose également et peu amener à s’interroger sur d’éventuels abus de la part des salariés. Certains peuvent considérer qu’un simple ordre répété constitue une forme de harcèlement, lorsqu’ils estiment que la tâche dépasse leur mission. Ainsi, afin d’évaluer les situations qui posent problème au sein des entreprises, afin de prévenir la saisie des instances juridiques, la médiation semble l’outil le plus pertinent, d’autant plus qu’il s’avère bien moins coûteux qu’une procédure prudhommale ou pénale.

La médiation est :  » un processus de communication éthique reposant sur la responsabilité et l’autonomie des participants, dans lequel un tiers impartial, indépendant, neutre favorise par des entretiens confidentiels l’établissement, le rétablissement du lien social, la prévention ou le règlement de la situation en cause « 

Dans les cas de harcèlement, elle peut être individuelle ou collective, par exemple à l’échelle d’un service. Parce que le ressentiment finit par prendre le pas sur le reste et parce que la dignité des personnes est atteinte, la médiation est adaptée dans les affaires de harcèlement.

Or, en considérant et en traitant la dimension affective et émotionnelle, la médiation va apaiser les tensions et réduire la charge émotionnelle du conflit qui a conduit à une impasse.Chaque protagoniste peut alors dépasser ses émotions négatives, retrouver une certaine sérénité et clarifier le problème de son point de vue.

Du fait de son caractère confidentiel, neutre, égalitaire, libre, la médiation devient un espace de confiance où les acteurs cheminent vers leur solution. Elle n’est pas la finalité mais bien le processus adapté à la recherche d’une solution qui peut prendre différentes formes :

  • la fin d’un malentendu et la continuité des relations de travail,
  • la fin d’un malentendu et la continuité des relations de travail avec des aménagements ou un changement de poste,
  • la fin d’un malentendu et le choix de l’un et de l’autre d’une rupture apaisée qui mène à une séparation consentie et négociée.
Le taux de réussite des médiations, tous sujets confondus, est de 90%, domaine social compris.

Elle peut et doit être mise en place rapidement, ce qui empêchera la situation de s’aggraver et permettra de trouver une issue partagée par les parties, rendant inutile l’intervention d’un tribunal pour trancher le litige. C’est d’ailleurs pour cette raison que cette méthode est préférée aux autres par le Code du travail.

Les entreprises peuvent mettre en place des dispositifs de prévention des conflits internes en formalisant le recours à la médiation et en le faisant connaître.

 

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